Malgré l’activisme de l’ancien commissaire paix et sécurité de l’Union africaine, Smaïl Chergui, le projet d’une force panafricaine de 3 000 hommes devrait être abandonné par son successeur Bankole Adeoye. Cependant, ce dernier ne renonce pas à l’idée de faire jouer un rôle central à l’UA au Sahel, alors que la France doit annoncer un retrait « conséquent » de ses militaires cet été.

C’était un des projets phares de l’ancien commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine (UA), l’Algérien Smaïl Chergui : le déploiement d’une force de 3 000 hommes de l’UA au Sahel. Ardemment poussé par le diplomate algérien qui l’avait annoncé à grand renfort de communication il y a un an, le projet devrait finalement être abandonné par le nouveau commissaire paix et sécurité de l’UA, le Nigérian Bankole Adeoye.

Crispation de Paris

L’initiative de Smaïl Chergui avait régulièrement attisé le scepticisme des capitales occidentales. Néanmoins, Chergui était parvenu au printemps dernier à convaincre l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) de mettre la main au portefeuille. L’organisation panafricaine avait un temps planché sur un plan de financement de 500 millions d’euros en faveur du projet. Ce dernier avait également eu à un moment les faveurs de Washington, qui voyait cette force comme un premier moyen d’alléger la « coûteuse » mission onusienne au Mali (Minusma).

En mai, Chergui avait présenté un premier calendrier prévisionnel aux cinq ministres des affaires étrangères du G5 Sahel. Dans la foulée, un « concept d’opération » avait été mis sur pied. Ce « conops » avait néanmoins crispé Paris : outre la Minusma, aucun mécanisme de coopération entre la force de l’UA, le G5 Sahel et l’opération française Barkhane n’était en effet explicité. Une position qui avait particulièrement irrité l’état-major français, alors même que la diplomatie tricolore est au premier rang sur le dossier sahélien.

Bataillon tchadien

Si le projet pourrait être abandonné par le nouveau commissaire Bankole Adeoye, ce dernier entend néanmoins encore davantage impliquer l’UA dans le dossier sahélien. L’organisation panafricaine doit ainsi officialiser dans les prochaines semaines la nomination d’un nouvel envoyé spécial pour le Sahel pour remplacer l’ancien président burundais Pierre Buyoya, décédé le 17 décembre.

Dans le même temps, l’UA doit faciliter le déploiement des 1 200 militaires tchadiens dans la zone des trois frontières. Ce déploiement, objet d’un long poker menteur entre Idriss Déby et Paris, a été officialisé par le président tchadien le 15 février au terme d’intenses tractations quant à la prise en charge financière de ce bataillon, qui doit être en partie assurée par l’Union européenne (UE). En bon tacticien, Déby n’a pas manqué de faire longuement monter les enchères en réclamant d’importantes per diem et divers équipements.

Retrait massif des militaires français à l’horizon 2022

Ce déploiement doit être un premier pas vers l’annonce d’un désengagement « massif » des militaires français de l’opération Barkhane. Si l’Élysée avait un temps souhaité mettre en scène la première étape de son retrait cet hiver, ce dernier devrait finalement être annoncé en juin. Une petite équipe de moins d’une dizaine d’officiers du Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO), avec à sa tête deux colonels, est toujours chargée de plancher sur des scénarios opérationnels (Africa Intelligence du 15/01/21).

Parmi les pistes à l’étude figure notamment la division par deux, à l’horizon 2022, des effectifs de Barkhane. Dans la foulée, la plus grande « opex » tricolore devrait également changer de nom et muter vers un partenariat militaire opérationnel (PMO). Un acronyme comme les militaires les affectionnent qui désigne la conduite d’opérations conjointes aux côtés des armées sahéliennes.

Tchadanthropus-tribune avec la Lettre du Continent

1057 Vues

Il n'y a pas encore de commentaire pour cet article
Vous devez vous connectez pour pouvoir ajouter un commentaire