Le gouverneur tchadien de la BEAC a publié la liste des admissions d’un concours de recrutement controversé, malgré la décision du conseil des ministres de le suspendre. Mais de nouveaux foyers de contestation émergent…

Abbas Mahamat Tolli vient d’en rajouter une couche alors que sa gestion du dossier est de plus en plus contestée. Le 5 avril, le gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a publié la liste des admissions définitives au concours de recrutement des agents d’encadrement supérieur qui a déjà fait couler beaucoup d’encre. Le Tchadien est soupçonné d’avoir favorisé des proches dont son épouse. Des accusations qui visent aussi l’ancien vice-gouverneur camerounais et actuel président de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC) Dieudonné Evou Mekou et le secrétaire général sortant gabonais Désiré Guedon.

La nouvelle intervient après le sommet des chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) qui s’est tenu le 17 mars, à Yaoundé.

Double quitus

À cette occasion, le banquier central a rendu compte de la situation monétaire de la zone et a également présenté les conclusions du rapport sur l’évolution de la coopération monétaire avec la France. « Mais, à aucun moment, ce sujet controversé n’a été évoqué ni en conseil des ministres ni lors de la rencontre des dirigeants des six pays [Cameroun, Gabon, Congo, Tchad, Centrafrique et Guinée équatoriale, NDLR] », souffle un participant. Est-ce le silence des participants qui conforte le Tchadien dans sa décision ?

Son entourage met en avant le « double quitus » obtenu pour la justifier. Le premier se réfère à l’avis favorable donné le 16 novembre par la Cour de justice de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) qui contredit la résolution des ministres des Finances du 6 octobre, suspendant le processus et instruisant un audit externe.

L’autre est la résolution du conseil d’administration du 6 octobre qui, sur la base du rapport d’information du comité d’audit interne à la Banque centrale, indique que le processus « sera finalisé en se fondant sur les critères liés au mérite, à l’équilibre sous régional et au genre. »

Un démarrage au 5 juin en péril ?

Le casting des décideurs a beau avoir évolué avec la nomination Jean-Baptiste Ondaye au poste de président du conseil d’administration de l’institution et du comité ministériel de l’Union monétaire de l’Afrique centrale (Umac), la partie n’est peut-être pas encore gagnée.

De fait, si le ministre congolais de l’Économie et des Finances est certes moins enclin que son prédécesseur, le Centrafricain Hervé Ndoba, à maintenir un bras de fer avec le banquier central et plus soucieux de préserver l’indépendance de la BEAC, d’autres foyers de contestations semblent émerger.

La menace pourrait venir de l’intérieur avec l’arrivée de nouveaux membres (vice-gouverneur, secrétaire général et directeurs généraux) du gouvernement de la BEAC, dont certains ont suivi de près le processus et y ont apporté des réserves. À présent qu’ils se trouvent au niveau décisionnel au sein d’une institution, ils peuvent exiger que la collégialité prévale dans la prise de décision.

« La résolution du conseil des ministres exigeant la suspension du concours, en dépit de l’avis du juge communautaire, demeure. Et le conseil d’administration de la banque n’est qu’un organe technique du conseil des ministres », analyse un cadre maison.

En outre, les changements ministériels intervenus au Congo et en Guinée équatoriale obligent aussi le gouverneur à s’assurer du soutien des nouveaux venus s’il veut éviter d’autres contestations. De l’eau pourrait donc couler sous les ponts avant le 5 juin, date prévue pour le démarrage de la formation des admis.

Jeune Afrique

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