Rien n’est moins sûr.  L’organisation de l’assemblée générale élective prévue le 30 novembre 2023 pour mettre en place un Conseil de la Fédération Tchadienne de Football Association (FTFA), fut interrompue manu militari, sur décision de la Justice Tchadienne (Tribunal de Grande Instance). Un acte de souveraineté contraire aux règles de la FIFA, mis en exécution en présence de ses délégués et celles de la CAF, envoyés pour superviser l’opération à N’Djamena. Malgré les civilités et les échanges courtois engagés avec les autorités tchadiennes par les délégués FIFA/CAF, rien n’y fit jusqu’à leurs départ. Depuis, tous les regards sont tournés vers la FIFA et son Bureau du Conseil. C’est cette instance qui décidera de la suite à donner. Suspendre le football tchadien pour ingérence de la justice tchadienne ? Décider de reprendre tout ou partie du processus électoral, revoir la question des critères d’éligibilité et du parrainage des candidats, et reconduire le CONOR en le renforçant ? Autant de questions qui peuvent se poser.

Destinés au financement des programmes de développement que la FIFA met en œuvre dans chaque pays, et au soutien du fonctionnement de la fédération membre, ces fonds nourrissent aujourd’hui partout en Afrique, tous les fantasmes. Ils sont devenus ainsi un point d’achoppement et de discorde entre la FTFA et ses membres affiliés, d’une part, et le ministère des sports, de l’autre. Leur utilisation ne correspondant pas souvent à la réalisation de leur objet. Le manque de rigueur dans le contrôle et l’évaluation complaisante qu’effectuent les représentants de la FIFA/CAF, ont fini par créer et alimenter des suspicions de tout genre, et compliqué davantage les rapports difficiles entre la FTFA et le ministère des sports. Et, pour couper court sans doute, à cette situation intenable, le Bureau du Conseil de la FIFA a décidé de mettre en place, comme ailleurs en Afrique, un Comité de Normalisation (CONOR).

Paradoxalement, les membres de ce CONOR sont choisis et proposés pour partie, de commun accord entre les autorités tchadiennes et la FIFA. Mais, ils sont nommés, employés et rémunérés directement par cette dernière. A ce titre, ils ne peuvent rendre compte qu’à elle seule et non aux autorités tchadiennes pour lesquelles, certaines actions sont pourtant réalisées en leurs noms. Missionné uniquement sur la base d’un cahier de charges et d’un mandat précis, le CONOR a, faut-il le rappeler, pour tâches de :

– gérer les affaires courantes de la FTFA,

– réviser les statuts et le code électoral de la FTFA, afin de garantir leur conformité avec les exigences et principes des statuts de la FIFA, et veiller à leur adoption par l’assemblée générale de la FTFA,

– élaborer avec l’aide de la FIFA, un accord de coopération entre le ministère des sports et la  FTFA qui définira des responsabilités et des objectifs pour chaque partie,

– en dernier lieu, agir en qualité de commission électorale pour l’organisation de l’élection d’un nouveau comité exécutif de la FTFA sur la base des statuts et du code électoral révisés.

Au regard de ces points, seul le premier requit l’intérêt du CONOR et constitua l’essentiel de ses actions. Ainsi, l’engagement des équipes nationales (SAO) dans les compétitions internationales, l’organisation très médiatisée des finales des compétions nationales, la signature de partenariat avec des fédérations étrangères, la contractualisation d’accord avec un équipementier européen, l’invitation des 2 stars du football africain, sont entre autres actions entreprises. Mais, rien de marquant n’impacta véritable la conduite de cette normalisation. Il en est de même du brassage de la jeunesse, un objectif visé par les acteurs politiques. Ces résultats qui sont plus un échec qu’une réussite de la normalisation, peuvent s’expliquer par l’absence de concertation avec les acteurs du football tchadien et par la suffisance, voire, l’arrogance de certains membres de ce CONOR.

Malheureusement, tout cela s’est fait avec le soutien des autorités tchadiennes et avec un silence complice de la FIFA/CAF. Car, ces instances du football international qui refusent toute ingérence, savent que le CONOR n’est pas là pour remplacer la FTFA, une instance élue sur un programme qui repose sur des prérogatives statutaires. Mais le laisser faire de la FIFA/CAF et l’indifférence des autorités tchadiennes dans la gestion et le suivi de ces affaires courantes, ont permis à certains membres du CONOR, de s’arroger les pleins pouvoirs, pour agir à la place du Tchad et de la FTFA.

Dans les jours à venir, le Bureau du Conseil de la FIFA rendra son verdict sur la situation du football tchadien. Quelle que soit la décision qu’il prendra, elle ne peut le dédouaner de sa responsabilité dans l’échec de cette normalisation. Les nouvelles autorités tchadiennes qui ne sont pas comptables de cette situation, doivent maintenant prendre à bras le corps le dossier, l’examiner avec rigueur et minutie, en y associant les techniciens du ministère des sports. Elles pourraient élargir leur action au COST, aux conseillers des sports de la primature, de la présidence et du CNT. Le pays est en transition certes, avec de multiples priorités et urgences. Toutefois, après la validation par le CNT du programme de gouvernement de la 5ème république, le tout nouveau ministre de la jeunesse et des sports sortira conforter pour prendre des initiatives fortes concernant tout le sport tchadien. Pour le football, il n’aura pas d’autres choix que d’organiser dans les meilleurs délais, une rencontre regroupant tous les acteurs de Ndjamena et des provinces. Celle-ci aurait pour objet, entre autres, de les écouter et de recenser tous les vrais problèmes qui minent ce football tchadien.

Les acteurs du football pourraient se saisir de l’occasion pour : mettre de côté leurs égos, leurs rancœurs et autres considérations afin de laver leur linge sale en famille et sauver ce qui peut encore l’être. Dans cet esprit, pourquoi ne pourraient-ils pas prendre en toute responsabilité à leur compte le travail inachevé du CONOR, le revoir, l’améliorer et le finaliser ? Qu’importe la formule consensuelle qu’ils auront choisie, l’essentiel est qu’ils proposent leur propre solution de sortie de cette crise. Ils démontreraient ainsi leur volonté à relever et mettre sur orbite leur football.

Il est grand temps que les dirigeants africains, et notamment tchadiens, arrêtent de prêter le flanc à l’infantilisation. Ils doivent comprendre que, en apportant leurs aides et fonds pour soutenir le développement du football, la FIFA et la CAF sont dans leurs rôles. Ce qui est louable. Les nouvelles autorités tchadiennes qui ne manquent pas des techniciens compétents et des acteurs avisés de notre football autour d’eux, pourraient demander courageusement à la FIFA et à la CAF de leur laisser la gestion et la finalisation de ce dossier, tout en leurs accordant un délai raisonnable.

Ce qui serait une 1ère en Afrique, si cela peut être le cas. Les tchadiens prendraient et assumeraient leurs propres responsabilités, en préparant et organisant cette assemblée générale élective. Celle-ci tiendra compte du respect des textes réglementaires tchadiens et ceux de la FIFA/CAF qu’ils prendraient soin d’inviter à cette occasion. Bonne et heureuse année 2024 à tout le sport tchadien.

BANGALI DAOUDA Boukar

Le Tchadanthropus-tribune

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